bienvenue à tous,

Il me revient un vers de Renée Vivien ( ma poétesse favorite ),
« Quelqu’un
Dans l’avenir
Se souviendra
De nous… »
Cette strophe résume aisément le sujet d’ « histoirecenthistoires ».
L’intérêt porté, par nos contemporains, aux vedettes actuelles occulte
bien souvent le souvenir des célébrités d’autrefois.
Tranquillement, peu à peu, le temps et les hommes ont effacé leurs empreintes de nos mémoires.
Retrouver leurs traces, se souvenir d’elles, est la pensée de ce blog.
J’affectionne aller reconnaître les catacombes du passé, où dorment ces héroïnes et ces héros.
J’aime questionner les ruines des lieux où leurs cœurs battirent. Je m’émerveille de voir ces endroits abandonnés, pourtant magiques, se ranimer, au premier accent du rêve, et retrouver tout leur éclat ancien.
Je vous invite à partager avec moi, ces rêves, ces enchantements, par des textes, de la poésie, des images et des récits de voyages.
C’est à une « odyssée » que je vous convie.
Embarquons alors et voguons !
J .D.

lundi 16 mai 2011

Bruxelles, capitale de la France ?


Le dernier Carolingien, Louis V, acclamé roi à Compiègne et sacré à l’âge de douze ans, meurt, en 986, âgé de vingt ans et sans enfants.  L’ensemble des seigneurs se réunit à Senlis pour élire l’un d’entre eux à la tête du royaume de France.  On a volontairement oublié de convoquer quelqu’un.  Fils du roi Louis d’Outremer, frère du roi Lothaire et oncle du jeune Louis V, Charles duc de Basse-Lotharingie n’a pas été invité.   Charles représente pourtant la légitimité.  Loué par certains, représenté par d’autres comme un voleur qui a dépouillé l’évêché de Cambrai, le duc Charles vit à Bruxelles.  Il en a fait sa capitale.  Bruxelles, appartenait à Gerberge, l’épouse de Louis d’Outremer. Après une rébellion contre l’empereur Othon 1er, ce douaire fut confisqué.  Le fils cadet de Gerberge, Charles de France, réclama les armes à la main son bien.  Othon II lui rendit son héritage pour avoir la paix.  A cette occasion, l’empereur d’Allemagne signa à Bruxelles plusieurs actes.  Charles, qui jusqu’alors n’avait que son épée, fut fait duc de Basse-Lotharingie.   
Bâtie autour d’une rivière navigable, la Senne, protégée par un château, des forêts et des marais, Bruxelles a déjà acquis de l’étendue et de l’importance.  Point de transit entre la Flandre et Louvain, Liège et Aix-la-Chapelle, cette cité attire sur elle l’attention des princes et du commerce.  Un évêque s’y était déjà installé vers l’an 700.  Charlemagne y avait eu une habitation et Louis-le-Débonnaire y fonda, dit-on, l’église de Saint-Jacques-sur-Coudenberg.  Sur la colline Saint-Michel existait déjà la chapelle qui allait, plus tard, devenir cathédrale.  A une capitale qui se respecte, il faut un Saint protecteur ou une Sainte.  Paris a Sainte-Geneviève, Bruxelles aura Sainte-Gudule.  Charles y fait transporter, en 978, le corps, bien abîmé, de cette Sainte, morte en 712.  Il installe les reliques dans la chapelle de son château.

Retournons à Senlis qui, se trouve sur les terres de Hugues Capet.  Hugues est un ambitieux, cousin du roi Lothaire, ils ont grandi ensemble.  Il rêve de s’asseoir sur son trône, être le roi à la place du roi.  On suspecte son père de lui avoir mis cette drôle d’idée dans la tête : «  Un jour, mon fils… ».   En attendant ce jour, il conspire.  Lothaire, profitant d’une réconciliation avec le turbulent comploteur, fait couronner son fils, Louis.  On est jamais trop prudent avec le cousin Hugues.  Précaution utile, car Lothaire meurt avec tous les symptômes d’un empoisonnement. Rapidement, les soupçons se portent sur Adalbéron, évêque de Laon et sur la reine Emma, l’épouse germanique de Lothaire.  Les deux ont, comme on dit, une relation coupable.  Le mari gênait.  Le roi gênait aussi.  Lothaire avait conduit une expédition militaire contre Théophanie veuve d’Othon II de Germanie.  Rancunière, Théophanie a décidé depuis, la chute des carolingiens. Pour réaliser ce dessein, elle peut compter sur l’aide d’Hugues et de l’archevêque de Reims, qui s’appelle aussi Adalbéron.  Pendant la guerre, par ses conseils, cet archevêque avait porté secours à la reine de Germanie.  A présent, sur le trône, Louis V succède à son père.  Louis veut punir Adalbéron pour sa collaboration avec l’ennemie des carolingiens.  Il l’accuse de trahison et le qualifie : «  …d’homme le plus scélérat de tous ceux que la terre supporte… ».  Le procès de l’archevêque commence.  Louis se trouve à Senlis (le hasard tout de même), lorsque subitement, à son tour, il décède.  Officiellement, il succombe à une chute de cheval, mais plusieurs chroniques parlent des mêmes symptômes que ceux de son père.  Peut-être succombe-t-il  à l’un et à l’autre ?  

Cette mort arrange bien des affaires.  Grâce à la disparition de Louis, le bon archevêque échappe au tribunal et à la condamnation.  En public, Hugues, qui fait le remplacement, innocente le prélat de toutes les accusations portées contre lui.  La route du trône est maintenant libre.  Une assemblée de prélats et de grands seigneurs se réunit à Senlis.  Descendant de Charlemagne par les femmes, comte de Paris et duc de France, Hugues veut être acclamé roi.  C’est le bon moment, la loi salique n’est pas encore d’actualité et l’unique prétendant est à Bruxelles.  Il faut faire vite pour couper le chemin à ce rival.  L’assistance, présidée par le bienveillant archevêque de Reims, se dépêche d’élire Hugues, roi de France.  Le 3 juillet 987, L’affaire est dans le sac, dans la cathédrale de Noyon, Adalbéron sacre Hugues.  L’ecclésiastique devait bien ce service au nouveau roi.

Dépossédé de la succession, Charles, pour défendre ses droits, décide une descente dans le royaume.  Sans alliés parmi les grands de France, il a contre lui sa belle-sœur, veuve de Lothaire et le parti germanique de la cour soutenu par Théophanie.  Tous épousent la cause d’Hugues Capet.  Malgré ces désavantages, Charles qui a réuni quelques troupes, prend Laon. Il fait prisonnier la reine Emma et son petit protégé, l’évêque Adalbéron.  Il en profite pour s’y faire sacrer roi de France. Voilà deux rois à la tête de la France et sur les bras des Français.  L’un est de trop, l’affrontement devient inévitable.  Hugues doit maintenant se défendre contre son rival qui prend l’offensive.  Pendant quatre années, non seulement, Charles reste invaincu mais il progresse.  Laon, Soissons et Reims sont à présent en son pouvoir.  Hugues se rend bien compte qu’il ne peut plus gagner militairement.  Alors pour renverser son adversaire, il décide d’employer l’arme de la trahison.  La créature de la reine Emma, Adalbéron, l’évêque aux petites infusions mortelles, va se charger de cette infâme besogne.  Une nuit, à Laon, pendant le sommeil de Charles, l’homme d’église introduit dans la chambre royale quelques hommes de mains.  Ils s’emparent du dormeur et le livrent pieds et poings liés à Hugues.  Sous bonne garde, le prisonnier et toute sa famille sont conduits d’abord à Senlis, où l’on décide de leur sort, puis à Orléans où ils sont enfermés. Bruxelles ne reverra plus son prince.  Les circonstances de la fin de Charles restent pour le moins assez mystérieuses.  L’Histoire donne 991 ou 992, l’année de son trépas, mais…

Cette affaire mit fin aux prétentions carolingiennes sur la couronne de France.  Par une usurpation, par une trahison et peut-être par deux empoisonnements, Hugues Capet venait de faire parvenir sa famille sur le trône de France pour plus de huit siècles.  Débuts très prometteurs…
Si Charles  avait été victorieux,  la dynastie carolingienne aurait continué à régner, mais pour combien de temps encore ?  Bruxelles aurait peut-être été la capitale de la France…Mais rien ne dit que le Carolingien serait resté dans cette ville.  Paris possède tant de charmes... «  Sous le pont Mirabeau coule la Seine »  et Bruxelles n’a plus de ponts sous lesquels coule la Senne.  La rivière qui lui a donné naissance, sert d’égout aux Bruxellois.  C’est diablement moins poétique et pas de quoi donner une envolée lyrique à Apollinaire.  

 J.D.

NB : Une question sur le propos ? Une remarque ?  Envoyez-moi un mail ou laissez-moi un commentaire.  J’y répondrai avec joie.  J.D.






Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire