Louisa Pène-Siefert vit le jour à Lyon en 1845. Mariée à trente ans, elle décède deux ans plus tard. Souffrances, exaltations, déceptions secouent sa vie. Pour fuir cette existence douloureuse elle se réfugie dans la poésie. Elle débute avec un volume de vers sorti en 1868 (les rayons perdus). Beau succès de librairie, cinq cents exemplaires vendus en moins d’un mois. Suivent alors d’autres ouvrages où son talent s’affirme de plus en plus. « …c’est aussi beau que les plaintes d’Antigone dans Sophocle… » (Rimbaud).
Cœur déçu et blessé, Louise développe dans ses poèmes des sentiments très féminins en employant des expressions très masculines. Ses vers sont précis, nets, réalistes. Un art du rythme caractérise ses chants.
Patriote autant qu’amoureuse, elle publie en 1871, des vers civiques ( Les saintes Colères). Parmi ses amis, on compte Hugo, Banville, Leconte de l’Isle et Sainte-Beuve.
Malheureusement, cette poétesse originale, marquée par le fatum, a laissé une oeuvre inachevée. Quelques poèmes, un roman (Méline) et un livre posthume (Souvenirs) publié par sa mère, c’est peu pour une enfant des Muses. On l’oubliera vite.
Cette jeune femme qui mourut au printemps de la vie, fut courageuse devant la fatalité. Malgré ses révoltes contre la maladie, les affolements et les angoisses de son inévitable fin, elle eut, dans un ouvrage, cette grandeur de rappeler au monde les vertus des Stoïques. Volontairement soumise à son destin, elle s’appliqua cette maxime : « la fin suprême est de vivre selon la nature ».
« Immortalité » est extrait des « Stoïques » publié en 1870.
IMMORTALITE
Le chêne dans sa chute écrase le roseau,
Le torrent dans sa course entraîne l’herbe folle ;
Le passé prend la vie, et le vent la parole,
La mort prend tout : l’espoir, et le nid, et l’oiseau,
L’astre s’éteint, la voix expire sur les lèvres,
Quelqu’un ou quelque chose à tout instant s’en va,
Ce qui brûlait le cœur, ce que l’âme rêva,
Tout s’efface : les pleurs, les sourires, les fièvres,
Et cependant l’amour triomphe de l’oubli ;
La matière, que rien ne détruit, se transforme ;
Le gland semé d’hier devient le chêne énorme,
Un monde nouveau sort d’un monde enseveli,
Comme l’arbre, renaît le passé feuille à feuille,
Comme l’oiseau, le cœur retrouve sa chanson ;
L’âme a son rêve encore, et le champ sa moisson,
Car ce que l’homme perd, c’est Dieu qui le recueille.
(Les Stoïques)
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